MARIE DE SOLEMNE

MARIE DE SOLEMNE

mercredi 26 août 2009

FRATERNITÉ… Où es-tu ?




L’INFINIE PUISSANCE DE LA DOUCEUR


Fraternité, qui es-tu ? Et surtout : où es-tu ?

Ces simples questions en disent peut-être plus sur la fraternité que de longs discours. Pourquoi semble t-elle si insaisissable et en même temps si désirable ?

En premier lieu, et au risque d’assombrir nombre d’illusions, un peu d’honnêteté nous oblige à constater qu’écrire sur la fraternité naturelle (familiale) révèle déjà bien plus de « dé-liés » que de « plein ».

Qu’en est-il de la fraternité spirituelle (fraternité d’esprit) ? Ce lien humain capable d’accueillir la différence, de recueillir l’indigence, de laisser fleurir l’espérance ?

Pour beaucoup, la fraternité semble réservée à des mondes à part : le monde religieux, la Franc-Maçonnerie, ou encore certaines communautés fraternelles laïques. Elle paraît n’être réalisable qu’au sein de lieux précis, fermés ; ne concernant que des personnes choisies, quelques minorités cultivant un jardin fraternel privé, en vase clos, protégé des turbulences de la vie âpre du dehors.

Pourtant la fraternité ne grandit pas si on l’enferme ; elle ne jaillit que de l’Ouvert. Elle commence son œuvre dans le cœur de chaque être humain, et c’est ainsi qu’elle avance dans les rues noires, qu’elle nous devance dans nos espoirs. Toujours elle accompagne le peu d’amour et de respect dont nous sommes capables, pour que l’étranger — cet autre qui ne m’est rien — puisse, grâce à elle, continuer son chemin en toute dignité.

Mais le mot « fraternité » dérange. On lui préfère des termes moins idéalistes, moins irraisonnables, plus accessibles comme : solidarité, amitié, camaraderie, compagnonnage.

La fraternité serait-elle hors de notre portée ? Serait-elle trop puissante, trop délicate à manier ? Le capital à investir serait-il trop élevé pour notre propre misère ?

Oui… la fraternité effraie. N’est-elle pas infiniment trop exigeante ? Est-ce pour cela que nous confions si volontiers aux saints et aux sages — qui savent donner sans recevoir — d’exercer la fraternité auprès des malheureux qui, eux, ne peuvent que recevoir sans donner ?

Une telle vision de la fraternité est non seulement réductrice mais aussi, avouons-le, dramatiquement veule.

La fraternité, ce n’est pas seulement donner ce que l’on a, c’est avant tout offrir ce que l’on est.

Face à cette définition, l’échappatoire semble bien mince… S’il est toujours possible de se dérober avec l’armure d’un : « je n’ai rien », qui oserait dire à voix haute : « je ne suis rien » ?!

La fraternité , c’est l’élan qui brise les murs d’indifférences ; qui fait que soudain, comme le dit A. Finkielkraut : cette souffrance qui ne nous regarde pas, nous regarde.

La solidarité, elle, est le bras efficace du sentiment fraternel. La solidarité est une attitude, nous dit A. Jacquard. C’est la mise en acte concret de l’élan initial, de cette inclination première. Fraternité et solidarité sont aussi indissociables et complémentaires que l’Amour (merveilleusement incompréhensible) et l’acte d’aimer (désespérément simple).

Mais si les images que véhiculent les mots Fraternité et Amour sont trop fortes, trop « engagées », nous pouvons cheminer doucement, pas à pas, sur le chemin qui mène au Grand Jardin avec leurs humbles serviteurs que sont : la tendresse, la patience, le respect et la bienveillance. Autant de fleurs qui n’attendent que l’écrin de notre cœur pour fleurir et nous réjouir.

Plutôt que toujours penser à l’autre en déclinaison négative ; plutôt que continuer d’enseigner à nos enfants : « Ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas que l’on te fasse », le temps est venu de réenchanter nos vies sur des accords affirmatifs :

« Fais aux autres ce que tu voudrais que l’on fasse pour toi ».

Marcher le premier, même si le chemin est abrupt. Oser aller vers l’insensible et même l’insupportable. Sourire à l’inconnu, car nous en sommes capables. Ne pas douter, ne pas craindre, car seul nous sera repris ce que nous n’aurons pas donné… et finalement, il ne nous est demandé qu’un peu de bonne volonté.

« Rien n’est plus puissant que la douceur, disait Dostoïevski, il n’est qu’à voir combien la banquise craint la douceur du vent du Sud… »

Dès lors, que craignons-nous exactement, pour à ce point nous enfermer dans les tanières sombres de nos vies trop privées ? D'aimer ou d'être aimé…?

Marie de Solemne

© Marie de Solemne


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